Teodora Vasileva, spécialiste Centre de Contact chez RingCentral, aborde la stratégie de cet éditeur en matière d'IA. Au-delà des cas d'usage qui sont évoqués, c'est aussi la question du juste usage qui est abordée.

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IA & Communications d’entreprise : le point de vue de RingCentral

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Transcription de la vidéo

Bonjour, je suis Didier Lambert, le fondateur de la plateforme HubTic, une plateforme de veille et d’information dans le domaine des communications unifiées, de la collaboration et de l’expérience client. Aujourd’hui, j’ai le plaisir d’échanger avec Teodora Vasileva, qui est spécialiste centre de contact chez RingCentral. Bonjour Teodora, comment vas-tu ?

TV : Bonjour Didier, très bien, merci. Et toi ?

DL : Bien, merci. Et bienvenue sur ce canal vidéo de HubTic. On est là pour parler d’intelligence artificielle, un vaste mot, un buzzword comme on dit, et surtout la façon dont un acteur comme RingCentral aujourd’hui intègre cette IA dans sa stratégie et dans ses produits. Est-ce que tu peux, auparavant, en quelques phrases, nous rappeler qui est RingCentral et comment cet acteur se positionne sur le marché ?

TV : Oui, bien sûr. Tout d’abord, merci beaucoup pour l’invitation. RingCentral est un leader mondial sur la partie solutions de communication unifiée dans le cloud, en proposant des solutions comme la téléphonie dans le cloud, la visioconférence, des messageries, et aussi du centre de contact dans une seule plateforme.

DL : Quand on parle d’IA chez RingCentral, déjà pour commencer, de quoi on parle exactement ? De quel type de technologie et de quel type d’usage ou de fonctionnalité on parle ?

TV : C’est une très bonne question parce que effectivement, l’IA, c’est un buzzword. Chez RingCentral, on est focalisé sur deux types d’IA : l’IA générative et l’IA agentique. C’est quoi la différence ? Sur la partie IA générative, c’est plutôt comme ChatGPT, où on est en train de créer quelque chose, comme le résumé d’appel ou le transcript d’appel. Et l’IA agentique, on va vraiment vers les actions. Par exemple, remplacer des agents dans un centre de contact par une intelligence artificielle qui est capable d’identifier des sentiments, d’être empathique, et vraiment peut-être remplacer certaines tâches répétitives dans un centre de contact. Mais pas que dans un centre de contact, ça peut être aussi dans la partie communication interne avec les employés.

DL : C’est vrai que dans les cas d’usage des briques d’IA, tout ce qui tourne autour de l’agent assisté est quelque chose d’assez identifié. Maintenant, il y a d’autres niveaux d’intégration de l’IA dans les différentes couches de services qui sont offertes par les solutions RingCentral aujourd’hui.

TV : Oui, bien sûr. RingCentral propose des solutions ouvertes, donc on s’intègre avec des solutions tierces du marché. Et en parlant d’IA plus concrètement, on propose des solutions avant, pendant et après l’interaction. Si on commence par la première phase, avant l’interaction, par exemple, on parle d’agents virtuels intelligents. Chez RingCentral, on a notre propre solution qui s’appelle AI Receptionist. C’est plutôt comme un bot assez simple qui répond à des questions comme : à quel moment vous êtes ouvert, est-ce que je peux prendre un rendez-vous, ou où vous êtes situé. Par contre, l’idée de RingCentral, c’est de ne pas vraiment proposer des agents virtuels intelligents assez avancés parce qu’on trouve que c’est un métier à part. Donc, si on retourne sur ta question, on s’intègre avec des solutions qui sont leaders sur le marché. Pendant l’interaction, on propose des résumés, des transcripts des conversations. On propose des possibilités d’aider des agents avec une fonctionnalité qu’on appelle en interne « agent assist », avec des réponses prédéfinies, intégration de LLM, par exemple. On s’intègre dans ce cas-là, par exemple, avec des CRM. On s’intègre aussi avec des bases de connaissances pour chercher dans la base de connaissance des réponses. Et bien sûr, pour la partie post-interaction, sur tout ce qui est gestion de qualité ou « supervisor assist », c’est aussi assez important. Tout ce qui est reporting, s’intégrer avec des outils comme Q tools pour analyser les conversations et former les agents en conséquence.

DL : C’est vrai que les questions d’intégration à l’existant, c’est extrêmement important. Est-ce que, sur la partie IA elle-même justement, il y a aussi une ouverture possible des solutions RingCentral à des IA tierces, ou est-ce qu’on s’appuie essentiellement sur les IA développées en interne chez RingCentral ?

TV : On propose les deux. On a notre propre moteur d’intelligence artificielle qu’on utilise avec les LLM. On s’appuie aussi sur la partie OpenAI. Par contre, effectivement, sur la partie bot ou agent virtuel intelligent, on s’intègre avec des solutions comme Cognitive AI, Dialogflow, et plein d’autres qui sont disponibles sur le marché. Et bien sûr, ça dépend des cas d’usage. Si le prospect ou le client en question préfère qu’on s’intègre avec ses propres solutions, on ne dit jamais non. En fait, on est aussi intégrateur, à part être opérateur et éditeur. On peut s’intégrer avec des solutions tierces si elles proposent aussi des API ouvertes.

DL : L’IA, on la trouve tout au long du portefeuille de solutions de RingCentral, mais on la trouve également dans les solutions soit concurrentes, soit complémentaires. Je pense notamment aux CRM. Comment, chez RingCentral, on gère l’organisation, le bon fonctionnement de toutes ces IA avec les autres ?

TV : Il faut voir, c’est vraiment très spécifique parce que c’est cas par cas. On voit aussi que certains des fournisseurs de CRM s’orientent aussi vers leur propre intelligence artificielle, et effectivement, il faut voir comment on peut coexister. Ça dépend vraiment du cas d’usage. Si le client insiste pour garder le CRM en question avec l’intelligence artificielle en question, on ne va pas s’y opposer. Par contre, on voit quand même que si c’est un outil de CRM avec une intelligence artificielle très orientée vers le CRM, il ne peut pas faire les mêmes fonctionnalités que nous. On essaie d’apporter des fonctionnalités en plus, par exemple, sur la partie « agent assist ». C’est typiquement des fonctionnalités pas vraiment proposées par un CRM. Par exemple, le résumé d’appel ou le transcript, aujourd’hui, presque tous les fournisseurs le proposent. Donc, on ne peut pas se différencier par ça, mais vraiment notre différenciation, c’est sur la partie gestion de qualité, donc post-interaction, et pendant l’interaction pour les agents. Et sur la partie analytics au niveau des échanges.

DL : Est-ce qu’il y a des cas d’usage particuliers qui semblent prendre le dessus par rapport à d’autres dans l’offre disponible chez RingCentral ?

TV : Oui, je pense que oui. Parce que sur la partie centre de contact, on propose au moins une plateforme omnicanal. On propose plus de 20 canaux digitaux plus le canal voix. Aujourd’hui, on est un des fournisseurs à proposer non seulement sur la partie voix ou sur la partie digitale, mais sur tous les canaux. Au niveau de l’intelligence artificielle, et surtout l’analyse basée sur l’intelligence artificielle, c’est assez important. Déjà, on propose plus de 250 rapports dans la plateforme de base, et toutes ces données-là, on peut les exploiter avec la brique d’intelligence artificielle et aller assez loin dans la partie analyse. On propose bien sûr tout ce qui est analyse des sentiments. Par contre, on est assez prudent parce qu’avec l’IA Act aujourd’hui, il y a quand même beaucoup de restrictions en Europe. Donc, on essaie de prévenir aussi nos prospects européens. Par exemple, aussi, tout ce qui est analyse de sentiments, c’est basé aussi sur tout ce qui est reporting. Et ça, on est capable aussi de le faire sur les canaux digitaux, sur la base, par exemple, des mots-clés utilisés, des exclamations qu’on utilise, les ponctuations qu’on utilise, ou aussi des émotions.

DL : Quelles sont aujourd’hui les architectures de déploiement des différentes IA de RingCentral qui sont disponibles, notamment pour les acteurs en France, puisque c’est une audience française essentiellement qui va regarder cet échange ?

TV : RingCentral est une entreprise américaine avec une forte présence en Europe. Donc, on s’est déjà assuré que toutes les données sont en Europe. Les serveurs sur les solutions de base de RingCentral et aussi sur les parties IA sont basés en Europe, en France et en Allemagne, pour être plus précise. Pourquoi pas en France, même si la France est notre plus gros bureau hors des États-Unis ? La raison derrière c’est qu’en Allemagne, ils sont quand même beaucoup plus stricts au niveau réglementation locale. Donc, c’est aussi la raison pour laquelle RingCentral a choisi l’Allemagne. Toutes les données sont utilisées et stockées en Europe, et pour la partie IA aussi, c’est pour ça. On essaie d’être toujours en conformité avec les régulations locales.

DL : Ces questions d’architecture, elles sont importantes, notamment pour des gens qui accompagnent les entreprises utilisatrices dans le déploiement et l’évolution de leurs solutions. Je pense aux cabinets de conseil en expérience client ou en transformation de l’expérience client. Par rapport à toutes ces nouvelles briques d’IA qui apparaissent sur le marché, qui évoluent chaque jour un peu plus, s’il y a un ou deux conseils qu’on peut proposer à ces consultants pour bien aborder l’IA avec leurs clients, ça serait lesquels selon toi ?

TV : Pour moi, vraiment, les consultants doivent bien rentrer dans le cas d’usage et comprendre ce que l’entreprise cherche avec l’intelligence artificielle, parce que c’est la partie automatisation. On parle vraiment de transformation de l’entreprise. Par exemple, l’entreprise Klarna, je ne sais pas si tu as entendu parler, c’est une entreprise suédoise avec un gros centre de contact, 700 agents. Ils ont décidé de changer tous leurs agents humains par des agents IA. Un an plus tard, ils se sont rendu compte que ça ne marchait pas. Donc, en fait, ils ont fait marche arrière. Même s’il y avait un gros Haro, parce qu’on sait très bien que, par exemple, dans le centre de contact, ce sont les employés, les agents, qui coûtent le plus. Et on sait très bien qu’aujourd’hui, avec les technologies qui sont sur le marché, on peut remplacer facilement un humain. On voit, par contre, qu’on reste humain. On préfère toujours parler avec des humains à cause des émotions, à cause des réactions des humains. Si je reviens sur ta question, pour les consultants, d’abord comprendre quel est le but de cette transformation. Est-ce que c’est vraiment au niveau financier ? Et si oui, dans ce cas-là, il ne faut pas chercher que des chiffres derrière, parce que effectivement, on ne peut pas battre un humain avec une intelligence artificielle assez avancée. Après, il faut voir aussi les cas d’usage. Si c’est des cas d’usage complexes, parce que effectivement, si c’est juste pour une banque qui reçoit des appels tous les jours pour donner des coordonnées ou des pins oubliés par les clients, ce n’est pas très intéressant pour un humain de traiter des cas d’usage comme ça. C’est plutôt effectivement automatiser des questions répétitives qui ne sont pas intéressantes et qui ne motivent pas même des humains. Donc, il faut vraiment rentrer, je me répète, désolée, dans les cas d’usage, et après évaluer vraiment si une stratégie 100 % intelligence artificielle est vraiment la meilleure ou pas.

DL : Trouver le bon équilibre en identifiant les bons cas d’usage. Ça fait plaisir d’entendre qu’il y a quand même une place pour l’humain dans tout ça, et une place non négligeable. C’est mon avis personnel.
Si on se projette un petit peu en termes de perspective, quelles sont les évolutions majeures ou les nouveaux cas d’usage, ou pourquoi pas d’ailleurs les nouvelles briques technologiques, qui vont faire encore évoluer l’IA selon toi ?

TV : Très bonne question. Parce qu’aujourd’hui, c’est très difficile de se projeter. J’écoute beaucoup de podcasts et des spécialistes dans le sujet. C’est la première fois que l’humanité est incapable de faire des prédictions, même pour les prochains 5 ans. Déjà, pour moi, l’IA, c’est indispensable. Nous, on l’utilise dans notre quotidien tout le temps. Et il ne faut pas être contre, mais il faut l’utiliser. Il faut savoir aussi comment l’utiliser. L’IA ne va pas remplacer l’humain. Moi, je l’aime, je crois pas. En fait, déjà, le fait qu’on a la partie des émotions, aussi la partie empathique, l’IA, même si elle peut être assez avancée avec l’IA génétique, elle ne peut pas remplacer l’humain. Donc, je pense, pour répondre à ta question, il faut utiliser vraiment l’IA pour aider ton quotidien et se focaliser, se développer, peu importe si c’est à titre personnel ou à titre professionnel, pour améliorer ta productivité, avoir plus de temps libre, même pourquoi pas. Et dans la partie centre de contact, c’est vraiment se focaliser sur les agents, être beaucoup plus focalisés sur des tâches beaucoup plus avec beaucoup plus de défis et avec des cas d’usage différents, ne pas lire un script. Et dès qu’il y a quelqu’un qui t’appelle au téléphone, que tu saches tout de suite que tu parles avec un humain, mais il sait même pas répondre parce qu’il a pas le droit de répondre parce qu’il a un script devant lui. Il doit être lui-même et, grâce à l’IA, répondre à des questions difficiles et utiliser l’IA pour s’améliorer, mais aussi utiliser ses propres qualités humaines, on peut dire ça.

DL : Donc, le principal défi de l’IA, c’est d’en garder la maîtrise, de savoir l’appliquer là où il faut et de garder la place à l’humain là où il y a une vraie valeur ajoutée et un besoin d’empathie et de réflexion, peut-être tout simplement importante.
Alors, Teodora, en termes d’ouverture et de conclusion, tu as évoqué l’IA générative versus l’IA agentique, qui est un terme dont on entend beaucoup parler. Comment, en termes d’IA agentique, RingCentral utilise cette nouvelle approche concrètement dans les offres qui sont au catalogue ?

TV : Si on prend des définitions officielles, il y a l’IA générative qui est vraiment basée sur la création de contenu. Par exemple, ChatGPT, le résumé d’appel, le transcript que je mentionnais tout à l’heure, tout ça, c’est de l’IA générative. Par contre, il y a l’IA agentique, qui sera aussi évoluée par rapport aux tâches qu’elle va effectuer et va finir. Par exemple, chez RingCentral, sur la partie IA agentique, on propose AI Receptionist. C’est une fonctionnalité. Qu’est-ce que c’est ? Par exemple, dès qu’un client appelle pour demander à quel moment il peut prendre un rendez-vous, par exemple avec Teodora, l’AI Receptionist va rechercher dans mon calendrier, va tout de suite proposer des dates et automatiquement fixer un rendez-vous entre Teodora et le prospect en question. Donc, vraiment accomplir. Et donc, c’est un bon exemple d’IA agentique. Et au niveau technique aussi, côté IA générative, on utilise beaucoup de prompts, donc c’est une intervention humaine. Et au niveau de l’IA agentique, l’humain n’intervient pas beaucoup. On laisse quand même la liberté à l’IA ou à l’IA agent de faire des actions et on n’utilise pas de prompts, ou très très peu.

DL : Super. Bon, merci pour ces éléments, ces précisions concernant l’IA agentique dont on entend beaucoup parler. Et puis, encore une fois, merci pour ton temps et j’espère à très bientôt dans la vraie vie

TV : Merci pour l’invitation. Très bonne journée.

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